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Le Cloud, mais adapté, peut être la manière de traiter les multiples données qui émaneront de l’internet des objets. Par Jean-Pierre Tournemaine, Directeur Général d’Interoute France.

L’Internet des objets révolutionne l’information, l’infrastructure et les business models L’Internet des Objets n’a jamais été aussi populaire, avec ses gadgets ou son électroménager intelligents, et nous assistons à un changement dans notre façon de collecter et de traiter l’information. Des capteurs permettent aux objets de générer des données partout dans le monde et les réseaux les diffusent. L’innovation technologique et la baisse du prix des matériels facilitent la collecte de grands volumes de données. L’Internet des Objets et le big data séduisent à présent les entreprises, et l’heure est venue de nous poser quelques questions : où sont stockées les données et où sont-elles exploitées ? Qui contrôle l’architecture et la gestion des données ? Quelles nouvelles opportunités se dégagent de leur utilisation ?Parce qu’avec des millions d’objets connectés diffusant des informations, la question est : que faire de ces données ? C’est là que les architectures cloud interviennent.

Des capteurs pour optimiser l’irrigation et les doses d’engrais

Le Gartner conseille aux organisations de construire des systèmes informatiques pour l’Internet des Objets afin de répartir le traitement des données entre plusieurs sites parce qu’une centralisation ne sera pas viable ni techniquement ni économiquement. Avec la quantité de données recueillies, les architectes informatiques devront redoubler d’efficacité dans leur manière de les diffuser. Prenons un exemple concret : celui d’un agriculteur qui, pour une efficacité maximale, diviserait ses terres en parcelles et les ferait surveiller par des capteurs dans le sol. Les informations remontées enclencheraient des actions en fonction des niveaux d’humidité, de l’intensité lumineuse et de la maturité du produit. L’engrais, l’eau et les pesticides seraient ainsi distillés en quantité nécessaire, bien calculée, et au moment opportun (un exemple pas si éloigné de la réalité si on s’intéresse aux expériences menées par l’agriculture de précision et le maillage avec des capteurs sans fil). La précision pourrait être telle que les capteurs recueilleraient les données de chaque plan. Utiliser ces capteurs et ces distributeurs automatiques connectés, relevant de l’Internet des Objets, aiderait l’agriculteur à déterminer ses dates de récolte, et dans une certaine mesure, à maîtriser le time to market.

Où traiter les données ?

Maintenant, où traiter ces données ? Le modèle économique actuel pourrait nous laisser à penser que le plus simple serait de les centraliser dans les data centres des supermarchés puisque ce sont eux qui achètent les produits de l’agriculteur et qui gèrent, pour la plupart, les chaînes d’approvisionnement entre le producteur et les consommateurs. Cependant, cette centralisation aura ses limites. Techniquement, d’abord, puisque le volume de données que nous sommes en mesure de recueillir avec l’Internet des Objets va augmenter inexorablement, et qu’à un moment donné, il deviendra trop coûteux et inefficace de centraliser ces données. L’idée va alors s’imposer de stocker et de traiter les données dans des data centres régionaux, plus près de l’exploitation, afin d’agir rapidement en fonction des instructions générées par les données de l’Internet des Objets.

Le cloud computing public est une alternative technique au modèle de stockage centralisé

Au lieu de confier l’analyse de ses données aux supermarchés, l’agriculteur pourrait stocker ses données dans des data centres régionaux, avec une tarification selon l’usage. L’agriculteur qagne ainsi non seulement un levier technologique, mais aussi l’opportunité d’un nouveau modèle économique : ne plus être l’une des extrémités de la chaîne d’approvisionnement mais s’approprier son contrôle et celui de ses propres données.

Un monde redistribué

Du côté des fournisseurs de cloud computing et des éditeurs de logiciels à la demande, cela pose un réel défi aux architectures cloud. Depuis que le cloud computing public est apparu avec Amazon Web Services il y a dix ans, la tendance a été aux grands centres de données centralisés, permettant de faire des économies d’échelle, vu leur taille. Aujourd’hui, pour les données et les réseaux liés à l’Internet des Objets, le modèle le plus économique semble être celui de la répartition des charges de traitement et de stockage de manière de plus en plus distribuée. Suivant le contexte économique, les données gagneraient à être traitées et restituées localement, ou en cascade, en étant filtrées à chaque étape, afin de réduire la taille des données envoyées pour traitement au centre d’exploitation final. Cela pourrait s’avérer plus efficace, plus rapide et moins coûteux que de transférer des données brutes sur de longues distances, avec une bande passante qui pourrait tout ralentir. Le centre de traitement final n’a besoin que de la synthèse des données utiles aux décisions stratégiques. Alors que l’Internet des Objets est en train de révolutionner l’information, il est crucial de construire les systèmes informatiques qui supporteront cette croissance. Il existe là une énorme opportunité de faire évoluer les modèles économiques et de changer les chaînes d’approvisionnement. Sans oublier des perspectives intéressantes pour le développement du cloud computing.

 

Publié le 21 mai 2015 par La Tribune