par Paul Monteiro, EVP Platform Operations and Engineering chez GTT Communications
La pandémie du coronavirus a suscité une forte demande qui a lourdement pesé sur les réseaux qui font le lien entre les populations et les organisations dans le monde entier, et sur les techniciens chez les opérateurs.
Paul Monteiro, EVP for Platform Operations and Engineering, a dirigé le plan de continuité d’activité chez GTT d’un point de vue opérationnel. L’objectif était de préserver la santé des équipes tout en continuant de garantir aux clients la sécurité, la fiabilité et la performance du réseau dont ils avaient besoin.
La continuité d’activité chez GTT
Notre réseau est emprunté par des milliers d’entreprises à travers le monde. Pour garantir son bon fonctionnement, 24h/24, 7 jours/7, nous disposons de cinq centres d’opérations (NOC), de services clients locaux et des stations d’atterrage sous-marines dans le monde entier.
Entre nous, notre équipe chargée de la gestion du réseau possède une solide expérience dans la gestion de crise en cas de catastrophes naturelles, elle a réponse à tout, face aux tremblements de terre, aux ouragans jusqu’aux nuages de cendres volcaniques. Cela dit, la pandémie de coronavirus a été d’une toute autre ampleur en raison de son impact mondial.
Voilà 20 ans que je travaille dans la continuité d’activité et le risque d’une pandémie a toujours plané au-dessus de nos têtes. Dans le milieu professionnel, vous vous dites que peut-être que ça n’arrivera jamais. Mais quand on a vu l’Italie fermer ses portes en mars, nous avons décidé de nous préparer à mettre en œuvre au niveau mondial notre plan de continuité d’activité en cas de pandémie
Nous avons une pratique établie qui consiste à faire des tests de mise à l’épreuve de notre plan de continuité d’activité chaque trimestre. Nous déroulons des scénarios de jeux de guerre et nous simulons notre réponse à chaque type de crise. Nous vérifions que les bonnes ressources sont en place au niveau des systèmes, des processus et des personnes mobilisées afin de nous permettre de nous adapter aux scénarios auquel nous faisons face.
Quand nous faisons des tests de mise sous pression, nous commençons par avoir une idée de scénario, de catastrophe due à l’homme ou naturelle. Ensuite, tout le monde, du premier niveau jusqu’à moi-même, environ 50 personnes, nous réunissons lors d’un entretien téléphonique. Nous déroulons le scénario dans les conditions les plus proches du réel possible. Par exemple, s’il s’agit de se déplacer vers un site de secours, après un sinistre, nous demandons aux employés de quitter leurs bureaux et de se rendre à l’endroit désigné. Nous regardons alors combien de temps cela prend de les installer, de les relier au réseau, pour leur permettre de travailler, de passer des appels, etc. Une fois que la situation est satisfaisante, nous clôturons l’entretien. Par la suite, un rapport d’audit détaille ce qui s’est bien passé et ce qui a besoin d’être étayé, fixé ou ajouté dans nos documents de procédures afin de garantir que cela se passera mieux, différemment et plus rapidement dans le futur.
Avec quelle rapidité les équipes chargées du réseau ont-elles répondu à la pandémie ?
Nous avons pris la décision de caler nos pas dans ceux des premiers gouvernements ayant imposé le confinement. Concrètement, nous avons immédiatement demandé à des centaines de nos techniciens de commencer à travailler depuis chez eux. Nous avons exécuté le plan de continuité des activités en plusieurs étapes. Les principaux secteurs fonctionnels concernés comprenaient le centre opérationnel de support, ainsi que l’ensemble des équipes en charge du déploiement des services pour les clients de GTT. Nous avons commencé par un quart puis la moitié et finalement la quasi-totalité des équipes techniques travaillant à domicile en l’espace d’une semaine.
La manière graduelle dont nous avons procédé à ce déploiement nous a aidés à prendre des décisions de façon agile. En travaillant progressivement et main dans la main avec notre équipe IT interne, nous pouvions comprendre quels étaient les problèmes et à qui les confier. Par exemple, nous nous sommes vite rendu compte que les connexions internet des foyers étaient très bonnes dans la plupart des pays. Cependant, une poignée de personnes ne disposaient pas d’une qualité de bande passante suffisante pour travailler à domicile, alors nous avons pris contact avec les opérateurs locaux pour monter en puissance de façon accélérée et nous assurer qu’ils avaient la bande passante adéquate, et pour les scénarios de reprise après sinistre, nous avons acheté un petit stock de cartes SIM 4G. Nous avons également mis en place une organisation pour disposer d’un stock d’équipement de rechange facilement accessible. Pour les appareils comme les ordinateurs portables, nous nous sommes assurés d’avoir des pièces de rechange dans les villes où nous opérons, qui soient accessibles même pendant le confinement. Ce genre de prévision s’est montré payant en particulier dans les régions où les bureaux ont été fermés par les autorités locales comme dans la ville de Pune, en Inde, où les ordinateurs portables sont devenus denrée rare, toutes les entreprises cherchant à équiper leurs équipes en même temps pour permettre le télétravail.
Opérer le réseau avec des équipes dispersées.
Ma principale préoccupation dans la mise en place d’un plan de continuité était de savoir comment ce nouvel environnement allait impacter nos collaborateurs et, en particulier, ceux qui travaillaient de nuit. Ce qui fait un bon environnement de travail de nuit (je parle de ma propre expérience), c’est la routine et la bonne camaraderie avec les collègues de bureau.
La communication a été primordiale pour surmonter cet obstacle. Chacun travaillant à son domicile, surtout au début, où de nouvelles routines se mettent en place, je pense que vous devez faciliter la communication plus activement.
Pour ce faire, nous avons organisé des réunions deux fois par jour, à 7h et à 19h (CET), qui nous ont permis de couvrir toutes les amplitudes horaires aux Etats-Unis et en Europe. Tout le monde se joignait aux appels, du haut en bas de la hiérarchie, de sorte qu’il y avait un bon passage de relais et un forum pour communiquer les premiers problèmes immédiats dans cet environnement. Les représentants de chaque NOC prenaient le niveau virtuel et donnaient une mise à jour concernant tous les domaines, du statut de nos clients alors que le monde entier était confiné, jusqu’à la stabilité du réseau, et enfin tout problème notable rencontré par le personnel utilisant la connectivité de son foyer. Je terminais la séance par un passage en revue de l’état de la situation dans le monde, la levée des confinements ou ce que nous pensions qui allait arriver. Cette pratique a donné à chacun un canal de communication obligatoire. Au fil du temps, nous avons arrêté les réunions quotidiennes et maintenant, elles ont lieu trois fois par semaine.
Gérer les priorités
Exécuter un plan de continuité d’activité en situation de pandémie représente un formidable challenge et c’est très différent des autres scenarios de continuité d’activité. Ça nous a demandé de nous adapter avec beaucoup d’agilité. J’ai été fortement impressionné par la capacité d’anticipation, l’esprit d’équipe et la détermination de notre personnel technique. Je crois que le besoin d’une plus grande agilité va persister dans les semaines et les mois qui viennent.
Dans un tel scénario, c’est important de continuer à ajuster vos tactiques et de continuer à regarder ce qui se fait ailleurs, dans d’autres fonctions, même en externe. Il est aussi important de regarder devant soi pour anticiper les besoins opérationnels futurs. C’est un défi que de se libérer du temps pour penser à toutes ces priorités immédiates. Mon conseil aux sociétés qui se retrouveraient dans une telle situation serait d’essayer des choses comme établir un plan pour traiter le travail en retard qui s’accumule pendant que vous gérez les besoins les plus urgents. Il est rassurant de disposer d’un plan pour gérer ce que vous ne pouvez pas faire pour l’instant et que vous puissiez communiquer clairement aux autres si nécessaire.
Ma principale priorité est la sécurité de nos employés et, par le fait même, la continuité du service pour nos clients. Le risque de vulnérabilité est la raison pour laquelle une planification et des tests de résistance minutieux pour se préparer à un scénario de crise sont d’une importance cruciale. Nous prenons soin de documenter nos processus afin d’assurer une exécution efficace en cas de crise.
Je travaille en très étroite collaboration avec les équipes RH et Expérience client pour m’assurer que nos collègues sont en sécurité dans leur travail et que nos services sont opérationnels. Notre philosophie de planification consiste à adopter une approche prudente qui tient compte d’une série de scénarios potentiels afin de garantir notre capacité à réagir avec souplesse aux prochaines phases de la pandémie, en adaptant nos pratiques à chaque zone géographique selon les besoins.
L’expérience client pendant cette pandémie
Nous sommes contents que la satisfaction client mesurée par notre support NOC ait montré une amélioration constante depuis le début de la pandémie, alors que notre personnel NOC travaillait depuis chez lui. Les opérateurs du monde entier ont mis l’accent sur la stabilité du réseau sur l’ensemble de la planète pendant le pic de la pandémie ; par exemple, en prenant des mesures comme la restriction des maintenances autorisées sur le réseau aux seules maintenances planifiées essentielles. Cela a contribué à assurer l’intégrité des réseaux à l’échelle mondiale tout a long de cette période, durant laquelle il n’a jamais été aussi important d’être connecté.
Apprendre à faire avec l’imprévu, une question d’éducation
Je suis né à 100 kilomètres au large de White Island, en Nouvelle-Zélande. J’ai grandi dans un milieu avec beaucoup d’activité volcanique, et tenir compte de l’inattendu fait grandement partie de mon éducation. Nous profitions d’une communauté locale forte où chacun s’occupait de son prochain. J’ai toujours essayé d’adopter cette façon d’être dans ma carrière.
J’apprécie les relations personnelles que j’ai au sein de mon organisation. Le dernier échange que j’ai eu avec mon équipe lors de notre entretien téléphonique concernait le fait que je cuisine beaucoup plus à la maison maintenant, avec mes enfants. Leur retour a été très positif. En faisant abstraction des titres et de l’ancienneté, nous vivons tous les mêmes choses. J’échange plus que jamais avec mon équipe, et pas seulement sur des sujets liés au travail, mais aussi sur ce qu’ils ont fait dernièrement avec leur famille ou tout seul, ce qu’ils ont vu et aimé sur Netflix. Certains de mes subordonnés directs m’ont apporté leurs conseils pour faire face au confinement et cela m’a énormément aidé. J’en ai appris plus sur les gens de mon organisation au cours des trois derniers mois qu’au cours des dix dernières années. J’ai également encouragé tout le monde à continuer à pratiquer des activités en dehors du travail. Pour ma part, je suis l’entraîneur principal du club de Touch rugby Junior de la République tchèque. Comme je n’ai pas pu le faire pendant le confinement, je me suis mis à faire de l’analyse vidéo pour les équipes, à leur donner des programmes de remise en forme individuels, à leur envoyer des commentaires et à maintenir le contact.
Quelques facteurs clés pour réussir son plan de continuité d’activité
Les facteurs de succès sont une planification avancée, des tests de mise sous tension réguliers et des communications fréquentes. Mais, plus encore, l’un des facteurs clés de succès à ne pas sous-estimer est d’avoir une équipe dédiée de techniciens talentueux. Je me sens chanceux chez GTT d’avoir un personnel et des collègues qui ont à cœur et s’efforcent de fournir un support exceptionnel chaque jour, ce qui nous permet en fin de compte de traverser cette crise et de continuer à satisfaire nos clients.
Publiée le 15 juillet 2020 par Global Security Mag