Par Mark Bakker, Responsable Benelux, H2O.ai.

L’Intelligence Artificielle est aujourd’hui au même niveau que la Business Intelligence il y a dix ans. La prochaine étape consiste à l’adopter, et la rendre véritablement opérationnelle.

La pandémie de COVID-19 a mis à rude épreuve, de manière inattendue et prolongée, de nombreuses entreprises. Mais s’il est peut-être trop tôt pour le dire, l’impact positif de cette première année de COVID-19 est la manière dont les organisations, en particulier dans le secteur des services bancaires et financiers, ont été contraintes de se tourner vers les technologies numériques pour identifier dans un premier temps les solutions permettant de réduire les coûts et survivre, mais également trouver comment accompagner davantage (et plus intuitivement) les clients en ligne.

Quand je parle de « technologies », j’entends par là tout ce qui va de Zoom à l’informatique dématérialisée, en passant par les chatbots. Mais en réalité, je m’intéresse surtout à l’intelligence artificielle (IA) et à son incarnation la plus contemporaine et pratique : l’apprentissage automatique à l’échelle industrielle. Et de ce point de vue, je constate avec regret que l’IA a encore du mal à être prise suffisamment au sérieux dans certains services financiers européens. Malgré les avancées étonnantes réalisées dans ce domaine au cours des deux dernières années, et certaines organisations avant-gardistes qui adoptent l’IA – des progrès qui en font une option désormais courante et vraiment fiable pour les entreprises – je me demande combien d’entreprises se sont lancées dans l’IA simplement parce que c’est à la mode, ou la considèrent comme un nouvel élément à exploiter.

Une liste convaincante et croissante des cas d’usage de l’IA

Cette position n’est plus défendable. C’est une façon de penser un peu obsolète, mais dans le domaine de la technologie, nous avions l’habitude de dire que seules certaines grandes idées passaient le cap de l’expérimentation et des cas d’usage pointus pour être acceptées/adoptées par le plus grand nombre. Je suis convaincu que l’IA en est à ce stade : elle a franchi ce pas et doit donc être examinée à sa juste valeur par les DSI des services financiers.

Après tout, l’IA constitue un énorme potentiel à court-terme pour les services financiers, avec plusieurs applications :

● L’Open Banking dans une Europe où la monnaie est de plus en plus dématérialisée : en 2021, nous verrons de plus en plus les consommateurs donner leur consentement pour des utilisations spécifiques, prescrites et limitées de leurs données de transaction auprès de multiples fournisseurs. Cela signifie beaucoup de données, qui évoluent rapidement, auxquelles il faudra s’acclimater car de plus en plus de dépenses se font en ligne : penser à la facturation dans les temps, à une meilleure détection des fraudes, à l’interaction en temps réel avec les clients et à la création d’offres personnalisées, intéressantes, au moment approprié.

● La fraude et la lutte contre le blanchiment d’argent : l’IA est déjà utilisée dans ce domaine mais nous savons que son usage est sur le point d’exploser. En effet, les malfaiteurs sont de plus en plus expérimentés et nos méthodes traditionnelles de lutte contre leurs agissements s’avèrent trop lentes et pas assez innovantes.

● Une modélisation comportementale précise : nous commençons à utiliser l’IA pour exploiter les données dans le but d’obtenir une tarification véritablement dynamique en vue de mieux comprendre les clients et mieux les accompagner (tout en étant utile pour l’entreprise).

● La percée des ‘assurtech’ ? Il y avait les biotech et les fintech. Place aux ‘assurtech’ : des produits financiers dans l’assurance vie et automobile qui utilisent les données de notre santé réelle et de nos états de conduite, relevés dans des systèmes d’IA qui seront capables de proposer une assurance entièrement personnalisée et appropriée à chacun grâce à un ensemble des données IoT (Internet of Things).

L’IA peut faire tout cela, mais elle peut aussi (et elle le fait) apporter son aide au workflow interne et au service client. En fin de compte, le rôle de l’IA est d’automatiser des processus qui étaient auparavant manuels. L’automatisation permet de réaliser les tâches plus rapidement, de diminuer les coûts et d’accompagner plus facilement les clients, de manière plus intuitive. En effet, implémentée correctement, elle réduit les erreurs. Il ne s’agit pas de remplacer tous les guichetiers par des robots ; mais de créer un mode plus coopératif, une synergie homme-logiciel. Avec l’IA, on veut arriver à une situation où le client peut demander ce qu’il veut et où il sera aidé par une personne humaine rassurante, soutenue par des processus automatisés incroyablement précis, justes et rapides dans le back-office.

Imaginez des tableaux de bord basés sur l’IA offrant une visibilité approfondie de la situation réelle de l’entreprise

En réalité, le marché est presque prêt sans le savoir. Rappelez-vous la manière dont la Business Intelligence (BI), désormais un outil classique pour les banques et les compagnies d’assurance ou organismes de carte de crédit, est devenue opérationnelle ; au début, elle était réservée à quelques élites, et puis, elle s’est démocratisée, est devenue plus sécurisée, fiable, conforme et disponible pour tous les décideurs.

L’IA est à peu près à ce stade, sur le point de passer le cap. Mais, ce qui la rend spéciale, c’est qu’elle complète et travaille avec les outils de Business Intelligence, mais qu’elle fait aussi des choses qu’eux ne peuvent pas faire. Par exemple : un processus type de rapport interne. Un responsable de département transmet la demande du conseil d’administration d’augmenter le chiffre d’affaires dans un secteur d’activité particulier. Pour mesurer les progrès accomplis par rapport à cet objectif, vous devez rendre compte du chiffre d’affaires effectivement réalisé. À la fin de l’année, la direction reçoit ce rapport et, avec la BI d’aujourd’hui, il sera précis, mais en réalité, ce ne sont que quelques chiffres… présentés sous forme de camembert ou de graphique à barres.

En regardant cela, nous pouvons nous dire que nous y sommes presque, mais qu’il manque encore quelque chose. Le camembert type ne peut pas dire ce qui se cache derrière – c’est un schéma statique, avec une connexion minimale ou un tableau de bord avec quelques filtres. Mais un tableau de bord doté d’intelligence artificielle et offrant une visibilité approfondie de la situation actuelle de l’entreprise grâce à des données en temps réel à grande échelle sera beaucoup plus utile. Il sera en mesure de mieux vous indiquer les tendances profondes, ce qui s’est réellement passé et ce qui se passera ensuite, de vous permettre de planifier des scénarios de type « et si », et bien plus encore.

Pour toutes ces raisons, d’une meilleure promotion de l’économie numérique à l’amélioration de la prise de décision, de l’amélioration de la détection de fraude aux produits personnalisés, de l’efficacité d’un back-office automatisé à l’amélioration du service client, il apparaît clairement que 2021 est l’année où l’IA est en passe de devenir la nouvelle BI dans le secteur des services financiers européens. Et ce sera une bonne chose pour tous.

Publié le 2 septembre 2021 par Finyear