Economie Matin

par Laurent Kupersztych

Le délai moyen d’affichage des sites européens est de 23,83 secondes, selon une étude réalisée par CDNetworks en 2016 à l’occasion de China Connect.

Les sites français affichent un temps de réponse moyen de 34,30 secondes en Chine, à peine plus long que le temps moyen de chargement d’un site anglais (32,12 s), alors que les sites italiens s’affichent en 22,3 s en moyenne et les sites allemands en 17,23s, presque deux fois plus vite que les sites français. Chacun peut tester le temps d’affichage de son site en Chine ici : http://china.cd-networks.de/en/china-webpage-speed.html

Des Chinois connectés

Le marché chinois est le plus important en matière de e-commerce et affiche la plus belle croissance mondiale. Il totalise actuellement 667 millions d’internautes, avec un taux de pénétration de 48,8 % : moins de la moitié de la population du pays dispose d’une connexion Internet. Le potentiel est colossal, surtout pour les marques françaises, chéries par le public chinois, qui considère le « made in France » comme un signe de luxe absolu.

La Chine compte notamment 593 millions de mobinautes. Il y a cinq ans, le nombre de mobinautes a dépassé le nombre de personnes n’utilisant qu’un ordinateur pour se connecter, et maintenant près de 90% des internautes sont aussi des mobinautes (China Internet Watch).

Même s’il n’a pas accès aux réseaux sociaux occidentaux, en raison de la censure exercée par l’état, l’internaute chinois utilise d’autres réseaux sociaux tels que WeChat, Qzone, ou encore SinaWeib et il adore ça. La Chine compte 653 millions de comptes et les Chinois passent en moyenne 1H27 par jour sur les réseaux sociaux. Internet est devenu un mode de vie en Chine.

L’e-commerce est en plein essor. La réservation de voyages et les achats en ligne ont le vent en poupe. Interrogés sur leur dernier achat, 40% des Chinois déclarent l’avoir réalisé en ligne. (Source : Google Consumer Barometer) Mais ce potentiel a un frein pour les étrangers voulant faire du commerce en Chine, via Internet : la lenteur d’affichage de leurs pages.

L’Internet non chinois ralenti

A cela trois raisons :
– Le temps de téléchargement augmente avec la distance entre le serveur du site Internet et le lieu de connexion de l’internaute
– La qualité aléatoire des connexions Internet : en Chine, six grands fournisseurs d’accès Internet se partagent le territoire mais sans véritable peering entre leurs réseaux, ce qui fait que les communications sont relativement lentes.
– Le grand firewall, un système extrêmement sophistiqué de filtrage et de censure de l’Internet. Cette procédure de vérification et de filtrage allonge considérablement le temps moyen d’affichage, puisqu’elle ralentit de 10 à 15 secondes le téléchargement de sites diffusés depuis l’extérieur de la Chine.

La solution évidente à cette difficulté consiste à contourner cette Grande Muraille pare-feu et à diffuser du contenu depuis l’intérieur du pays.

Seuls 2% des sites français ont un délai d’affichage acceptable en Chine

Alors qu’on estime qu’un délai de 10s est déjà inacceptable pour l’internaute qui perd patience, imaginez l’effet d’un site qui prend plus de 30s à s’afficher ! Or, 81% des sites internet de marques françaises membres d’Ubifrance testés mettent plus de 10s à s’afficher en Chine. 87% mettent plus de 7s, un délai déjà long pour conserver l’attention de l’internaute, 98% de ces sites français mettent plus de 3s à s’afficher, donc seuls 2% des sites auraient un délai d’affichage acceptable en Chine.

Un territoire mal desservi

Comme évoqué plus haut, ces délais s’expliquent en partie par la mauvaise qualité des connexions en Chine. L’Internet chinois est dominé par deux grands opérateurs : China Unicom et China Telecom. Entre le réseau d’Unicom dans le nord du pays et le réseau de China Telecom dans le sud, il y a peu de points de peering, ce qui donne un désert Internet dans le centre de la Chine.

D’autre part, l’Internet chinois est peu performant comparé à ce que nous connaissons, le débit moyen y est de 3,5 Mbit/s, il est de 8,9 Mbit/s en France. A cela s’ajoute une inégalité entre les internautes ruraux et les internautes citadins. Seuls 6% de la population bénéficie d’une connexion haut débit. Les régions de Jiangxi et Yunan ont le plus faible taux de pénétration Internet avec 32% de ménages connectés.

Une volonté de l’état de développer l’Internet chinois

Le gouvernement chinois a décidé d’investir 180 milliards de dollars US à la fin 2017 pour développer Internet sur le territoire. Ces déclarations sont à prendre avec prudence. Mi-2014, seuls 200 millions de Chinois possédaient une connexion haut-débit, à peine 30 millions de plus que deux ans plus tôt. La volonté de l’état se confronte à la capacité réelle des fournisseurs d’accès Internet à étendre leurs réseaux pour connecter plus de ménages. L’expansion d’Internet en Chine va donc durer quelques années.

Le marché du e-Commerce en Chine est déjà grand mais surtout, il a un potentiel énorme. La volonté du gouvernement chinois pour développer Internet est un signe positif même si cela prendra des années. Les marques françaises doivent prendre conscience que, si elles veulent s’imposer en Chine, via leur site Internet, elles doivent accélérer son temps d’affichage pour le rendre acceptable : 3s maximum. Un Content Delivery Network (CDN) peut être une solution : il copie le contenu des sites et le place sur des serveurs près des internautes chinois, à l’intérieur du pays, pour éviter de traverser le grand firewall, source de ralentissement, et régler les problèmes de distance.

Publié le 12 avril 2016 par Economie Matin